Ah, les archives du Figaro, je m'en lasse pas! J'avais aimé leur couverture de la Commune de Paris et là je remets un peu le couvert en lisant ce qu'ils disent sur l'enseignement laïc (loi Goblet, numéro du 30 octobre 1886)
Si au lendemain de la Révolution triom-
phante de 1830 quelqu'un avait dit aux
vainqueurs, - je parle de ceux qui tirè-
rent les marrons du feu, non de ceux
qui les mangèrent : .
- Vous venez de chasser un roi, pour
deux ou trois ordonnances qu'il vous
offrait de rapporter; eh bien ! dans un
peu plus d'un demi-siècle, la-France, si
chatouilleuse aujourd'hui sur ses droits
et sur ses libertés, acceptera très tran-
quillement, sans protestation, une loi
qui violera le premier principe de la
liberté civique : le droit du père de fa-
mille de faire élever ses enfants dans les
idées qui lui conviennent, dans la foi qui
lui est sacrée. Un ministre pourra dire,
en pleine tribune : « L'enseignement
civique, obligatoire, que portent les pro-
grammes, c'est l'enseignement des prin-
cipes républicains. » Et la France s'in-
clinera, et les pères de famille baisse-
ront la tête, et tous obéiront à la loi de
fer.
Si quelqu'un eût dit cela alors, un
long éclat de rire lui aurait répondu.
Toucher à l'autorité de la famille, con-
tester le droit du père à diriger l'esprit
de son fils : quelle plaisanterie I Dieu
merci ! la liberté est conquise, la liberté
pour tous, et personne n'osera plus im-
porter la main.
Arrivé à un certain degré, et nous y
sommes, l'arbitraire ne relève plus delà
politique; il ne saurait plus être ques-
tion, sous cette loi invraisemblable, de
préférences de régimes, pas même de pré-
férences entre les convictions religieu-
ses et les convictions philosophiques.
Mgr Freppel a fait trop d'honneur à la
majorité du Parlement en lui disant
qu'elle venait de diviser la France en
deux classes : les républicains et les
chrétiens. Tout se réduit, au fond, à une
division bien plus simple : les gens bien
élevés, qui ont fait de la France, depuis
trois siècles surtout, l'exemple de la po-
litesse, l'arbitre du goût - et les autres.
Blesser les consciences, insulter aux dé-
licatesses du coeur, cela ne relève plus
de la politique : ce n'est plus qu'affaire
d'éducation.